Marina Faust

Gallerande

DVD PAL, 23 minutes, 2006 / 37 €
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www.gallerandethefilm.com

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Une vaste maison bourgeoise devient le lieu d’une étrange cérémonie, une opération de filmage, de repérage, un ballet mécanique. "Gallerande" est ce théâtre soudainement occupé par une petite troupe de cameramen qui chasse quelque chose, une image ou un événement, un récit sans objet? Et ce n’est pas parce que l’objet du désir est manquant qu’il s’agit de n’importe quel objet. Pour ces hommes, ces femmes ou cet enfant, tant qu’une image est vivante, tant qu’elle nous regarde, c’est que fonctionne en elle, autour d’elle, quelque chose qui est du domaine de son énonciation primitive. Une petite machine à répéter le mot lacanien : « Tu veux regarder ? Eh bien, vois cela ! »

L’image ici est creusée par le pouvoir qui l’a permise, qui l’a voulue. Elle est cette chose que des gens ont pris plaisir à faire et que d’autres ont pris plaisir à voir. Et ce plaisir, lui, reste : « l’image est un tombeau pour l’œil ». Voir un film de Marina Faust, c’est arriver devant du déjà-vu. Du déjà-vu par d’autres, et le déjà-vu c’est du déjà-pris. Dans ce décor chargé d’histoire, il faut ancrer la mémoire d’autres maisons de cinéma (celles de Duras, de Pasolini), le récit des classes et de la différence des sexes, l’écart entre le grain et le bruit de l’image, ancrer le présent des corps, une forme d’érotisme qui valorise discrètement les parties les plus neutres. Relever tous ces aspects « moteurs » de corps appareillés, enchaînés aux meubles et aux objets, pour montrer que chaque élément doit être pris au sérieux, comme le fait que cette image n’est possible que là et non ailleurs.

"Gallerande" est un titre de roman français pour un film réaliste italien, traversé par un certain goût de la trivialité. J’entends réaliste au sens le plus stricte. Marina Faust nous parle du quadrillage d’un espace, du quotidien d’une troupe de techniciens, d’artistes, de figurants, de professionnels (peu importe), prise entre le désir inquiétant d’exercer son pouvoir et la jouissance de s’en défaire. Elle nous parle donc du spectacle, d’un théâtre hanté par le réel, qui permet des écarts, qui pense le temps comme une richesse infinie, qui n’est ni la vie ni son contraire, qui est comme la vie, qui se noue à elle, à plat, qui ne la transfigure pas, qui la continue. Qui continue aussi une certaine histoire de la modernité, où les films étaient toujours plus ou moins des documentaires sur l’état du matériau à filmer.


A spacious bourgeois house becomes the scene of a strange ceremony, a filming and locating operation, a mechanical ballet. "Gallerande" is this setting, suddenly seized by a small group of cameramen chasing something: an image, an event, or perhaps a narrative without an object… Just because the object of one’s desire is missing doesn’t mean any object will do. For these men, these women or this child, as long as an image is alive, as long as it is looking at us, something in or around it is functioning which echoes the image’s original enunciation. A little device repeating the Lacanian phrase: “You want to have a look? Well, look at that!”

Here the image is probed by the power which allowed it to be, which wanted it to be. The image is this thing which some people enjoyed making and others enjoyed seeing. And the pleasure itself remains: “the image is the eye’s tomb.” To watch a Marina Faust film is to face something that’s been seen before, seen by others before — and what’s already been seen has already been caught. Within this history-steeped décor, one must establish the memory of other film houses (Duras’s houses, Pasolini’s), the narrative of class and of the difference between the sexes, the gap between the grain and the sound of the picture; one must establish the present of bodies, a kind of eroticism which discreetly emphasizes the most neutral parts. One must note all the “moving” aspects of rigged bodies, bodies tied to objects and furniture, in order to show that each and every element needs to be taken seriously, like the fact that such an image is possible here and nowhere else.

"Gallerande" is a French novel title for a realist Italian film, infused with a certain taste for the trivial. I use realist in the strictest sense. Marina Faust tells us about covering a space, about the everyday experience of a band of technicians, artists, extras, professionals (it doesn’t matter), caught between the troubling desire to wield one’s power and the pleasure that comes from shedding it. And so she tells us about spectacle, about a reality-haunted theatre which allows distance, which conceives of time as an immeasurable treasure, which is neither life nor its opposite, which is just like life, which binds itself down to life, not transfiguring but continuing it. Continuing also a certain history of modernity, where movies were always more or less documentaries about the state of the material to be filmed.